dimanche 26 avril 2009

Fabrice Burgaud reçoit un blâme pour maladresses dans l’affaire d’Outreau

Le juge Fabrice Burgaud, chargé de l’instruction de l’affaire d’Outreau au début des années 2000 se voit condamné par ses pairs. Il reçoit un blâme lui reprochant maladresses et négligences. Les acquittés rejettent cette décision, l’intéressé également.

Le blâme est la sanction la plus légère possible. Les actions de Fabrice Burgaud dans cette affaire de pédophilie, devenue un véritable tollé, a été évaluée par ses collègues du Conseil Supérieur de la Magistrature. Les sages ont estimés qu’il avait commis « un certain nombre de négligences, maladresses et défauts de maîtrise dans la conduite de l’information ». Des erreurs qui ne sont pas condamnables séparément mais dont « l’accumulation constitue en l’espèce un manque de rigueur caractérisée ». Le professionnalisme, l’investissement et le sérieux du juge Burgaud ne sont donc pas remis en cause.

Ceux que l’on appelle maintenant les victimes d’Outreau, 12 personnes accusées à tord, ayant pour la plupart fait des peines de prison préventive, se sentent lésées par cette décision. Alors que le ministère de la Justice réclamait une sanction plus sévère, un an d’exclusion de la magistrature, les acquittés estiment que les souffrances qu’ils ont endurées ne sont pas reconnues. Ils continuent de reprocher une attitude froide et désinvolte de la part du juge qui les aurait condamnés trop vite, sans vouloir les écouter.

Les erreurs ont été multipliées dans cette affaire. Des exemples de non respect de la présomption d’innocence, des manquements aux procédures, la prise en compte de témoignages contradictoires, notamment chez les mineurs interrogés se sont multipliés au fil de l’instruction. Le juge Burgaud, isolé dans sa responsabilité de prise de décision s’est ainsi mépris sur des détails importants. Ces incidents ont coûté aux accusés innocentés plusieurs années de liberté et une terrible humiliation. Une accusation d’abus sexuel sur mineurs est souvent perçue avec une terrible violence par le public qui s’est fié aux avis du magistrat. Un 13ème accusé emprisonné à tord s’est donné la mort en prison.

Cette affaire est devenue un argument de poids justifiant la réforme du juge d’instruction proposée par le président Sarkozy. Le rôle trop important et parfois ambigu de ce magistrat étant dénoncé par une partie de l’Assemblée Nationale. Réduire son autorité et préciser son rôle sont devenus un leitmotiv visant à tirer des leçons du procès Outreau. Nicolas Sarkozy a ainsi relancé ce débat la semaine dernière, ne voulant pas laisser passer cette occasion et souhaitant ne plus jamais voir ce type de dysfonctionnements.

C’est en partie pour cette raison que Fabrice Burgaud rejette la décision du Conseil Supérieur de la Magistrature. Il ne reconnaît pas les fautes qui lui sont reprochées et continue de clamer avoir mené cette affaire comme il l’aurait du. Pour lui, les reproches qui lui sont faits sont faux. Il fait donc appel de cette décision et entend déposer un recours devant le Conseil d’Etat. Au-delà du blâme, c’est l’instrumentalisation de ce fiasco qu’il rejette. Pour lui, cette décision a été prise par ses pairs sous pression du public et des politiques ne pouvant tolérer que personne ne paie les conséquences d’Outreau. M. Burgaud note d’ailleurs qu’il n’est pas innocent que le président ait ressorti le dossier du juge d’instruction au moment même ou la décision le concernant devait tomber.

Il n’y a donc pour l’instant aucune vraie réponse au naufrage du procès d’Outreau. Les acquittés accusent la magistrature de se protéger en couvrant ce jeune juge dont ils mettent en question la capacité à mener ce genre d’affaires en sortie d’école de la Magistrature. Le juge Burgaud lui clame sa compétence et son sérieux et refuse d’être sacrifié pour justifier une réforme politique. Les souffrances individuelles des familles, des enfants et des victimes du procès risquent vite de disparaitre dans la polémique qui s’annonce.
Illustration : Françoise Bessières

vendredi 24 avril 2009

Obama interdit la torture à la CIA

Barack Obama veut que les méthodes des militaires et des services de renseignement des Etats-Unis deviennent plus propre. Après Guantanamo, le nouveau président s’attaque aux pratiques de la CIA qui a pris des libertés sous le gouvernement Bush en ce qui concerne la pratique de violences sur des prisonniers.

Publier quatre mémorandums impliquant directement des responsables de la CIA dans des affaires de torture n’a pas été une décision évidente pour le président Obama. Après concertation avec le reste de son équipe, les documents décrivant les méthodes d’interrogatoire du contre espionnage américain ont cependant été rendues publiques.

Les techniques utilisées frôlent les limites de la légalité. Les services de la CIA n’ont pas infligé de blessures physiques aux prisonniers et se sont principalement servis des peurs et des limites psychologiques humaines. Les individus soupçonnés d’activités terroristes ont ainsi subit des confinements, des privations de sommeil et de nourriture, des gifles ou un enfermement avec des insectes pour ceux dont c’était une phobie. La technique la plus sujette à polémique est celle du waterboarding qui consiste en des simulacres de noyade particulièrement éprouvants. Certains prisonniers comme Khaled cheikh Mohammed et Abou Zoubeida l’ont subit plusieurs dizaines de fois.

Barack Obama souhaite que les agents ne soient pas inquiétés pour ces actions. Ce sont les responsables qui devront assumer ces actes. Après avoir initialement proposé qu’il n’y ait pas de poursuites, simplement un aveu de la vérité, le président américain a laissé entendre mardi que la justice serait libre d’entamer une procédure.

Présent lundi à Langley, Virginie, au siège de la CIA, Barack Obama a été applaudit par les agents. Le Bureau dans son ensemble accueille cette nouvelle avec sérénité même si plusieurs cadres ont manifesté leur inquiétude quand aux conséquences de cette décision. Léon Panetta, nouveau directeur du service, a manifesté ses réserves au président.

Une décision qui met en danger la sécurité nationale

C’est Dick Cheney qui a pris la tête des contestataires. Si la tradition veut que l’équipe gouvernementale sortante évite d’entrer dans les débats avec la nouvelle administration, l’ancien vice-président a cependant décidé d’assumer pleinement ses décisions et continue d’assurer sa confiance en ces méthodes. Selon lui, les techniques utilisées par la CIA ont permis d’obtenir de bons résultats.

Décrire en public leur fonctionnement et mettre fin à ces pratiques est pour lui et pour de nombreux américains conservateurs un avantage offert aux terroristes qui sauront ainsi à quoi s’attendre en cas de capture. Tout comme une partie de la CIA, il craint que l’abandon de ces techniques d’interrogatoire ne rende particulièrement difficile l’obtention d’informations. Il y voit un risque pour la sécurité nationale.

Une partie des forces américaines s’inquiète de cette nouvelle difficulté. Alors que les règles d’engagement des soldats sont plus contraignantes que jamais, l’assouplissement des interrogatoires risque de rendre impossible l’obtention de renseignements et d’informations sur le terrain. Certains comme l’ancien quartier maître de première classe des NAVY SEALs estime que le discours et les choix des politiques est en décalage avec la réalité du terrain qui ne permettrait que rarement d’appliquer toutes les composantes du droit international et augmente le danger pour les soldats.

Les responsables de l’ancienne administration n’assument pourtant pas pleinement leurs décisions. Les interrogatoires sont normalement toujours filmés. Pourtant, 92 des films ont été détruits au cours de l’année 2005, laissant planer un doute sur ce qui avait pu être enregistré.


Illustration : Françoise Bessières
Extraits de documents : American Justice Department

mardi 21 avril 2009

Les ventes d’armes explosent pour l’anniversaire de Columbine

Cela faisait 10 ans lundi qu’Eric Harris et Dylan Klebold massacraient treize personnes dans leur lycée de Littletown, Colorado. A l’époque, l’Amérique traumatisée par la plus grave tuerie scolaire de son histoire, s’était posé la question du libre accès aux armes, en particulier chez les plus jeunes. En 2009, le débat en est toujours au même point et malgré d’autres drames, les propriétaires d’armes ont réussit à protéger leur passion.

Détenir une arme pour pouvoir se protéger est un droit immuable aux Etats-Unis. La Constitution prévoit dans son deuxième amendement que les citoyens puissent s’organiser en milices, détenir et porter des armes afin d’assurer leur sécurité. Cet argument a toujours permis aux lobbys favorable au port libre d’armes à feu de justifier le maintien de cette pratique. Les différents partis ne sont cependant pas d’accord sur l’interprétation de cet amendement. S’agit-il d’un droit individuel justifiant l’achat d’une arme personnelle ou d’un droit collectif qui pourrait permettre de limiter le port d’armes aux forces de l’ordre ?

Suite à la tuerie du lycée Columbine de Littletown, le débat s’est fait plus houleux et quelques hommes politiques du parti démocrate ont décidé de s’y intéresser. En 2000, Al Gorre, alors candidat à la présidence, a perdu de nombreux points dans les sondages en évoquant la suppression de la liberté d’achat d’armes à feu. Barack Obama avait à la même époque alerté les propriétaires d’armes en proposant d’augmenter les taxes de 500%.

Cette prise de position a peut être participé à la défaite d’Al Gorre en 2000 et a failli ralentir Barack Obama en 2008. Posséder une arme à feu fait partie intégrante de la culture américaine. Si certains Etats sont prêts à évoluer, d’autres, dans lesquels la police fédérale est très peu représentée, craignent une véritable augmentation de la criminalité si les citoyens ne pouvaient plus se défendre. Près de 300 millions d’américains détiennent 270 millions d’armes à feu aujourd’hui.

L’importance économique de ce marché pour le pays est également un facteur non négligeable. Les Etats-Unis produisent 30% des armements exportés dans le monde. Sur les 10 principales entreprises de production d’équipements de défense, 7 sont américaines et généraient un chiffre d’affaires cumulé de 144 milliards de dollars pour cette activité en 2007.

Depuis 1927, 40 000 lois fédérales ont été appliquées concernant cette question et ont progressivement augmenté les barrières à l’achat et à la détention d’armes. Aujourd’hui, il est plus difficile d’acheter des armes d’assaut ou des armes automatiques. N’importe quel Américain peut cependant acquérir, si son casier judiciaire n’implique pas le contraire, un fusil de chasse dés l’âge de 18 ans et une arme de point dés l’âge de 21 ans.

Les ventes explosent

Les ventes d’armes à feu n’ont jamais été aussi élevées. Malgré l’action plus active que jamais des associations anti-armes, les américains se précipitent pour acheter armes de poings et de chasse. Selon le FBI, les ventes ont augmenté approximativement de 42% au second semestre 2008 et de 27% au premier trimestre 2009.

Il existe deux raisons principales à cette augmentation. La première, c’est l’opposition du nouveau président à cette coutume. De nombreux américains craignent que Barack Obama ne durcisse plus que jamais l’accès aux armes à feu. En prévision d’une éventuelle législation, ils se précipitent et stockent un maximum d’équipements de défense tant qu’ils le peuvent. M. Obama reste cependant relativement discret sur cette question qui pourrait soulever toute une partie de l’opinion. Remettre en cause la détention d’armes est particulièrement complexe et délicat.

La crise a également joué en faveur des ventes d’armes. Avec l’augmentation des situations sociales critiques et du chômage, le sentiment d’insécurité augmente en flèche. Les citoyens ont peur de ce dont seraient capables les désespérés. Le climat particulièrement tendu incite de nombreux particuliers à s’armer pour protéger leurs domiciles ou leurs magasins.

L’achat d’armes à feu a été compliqué par le président Clinton avec l’instauration de la loi Brady en 1994 qui devait permette d’empêcher les citoyens dangereux d’acheter des fusils. Depuis, la mise en place de foires et de salons a littéralement explosé et permet à tout un chacun de venir acheter rapidement et sans rien justifier les armes de son choix. Il n’existe toujours pas de réglementation efficace limitant ce phénomène qui permet à presque n’importe qui d’acquérir une arme. Depuis le début de l’année 2009, une soixantaine de personnes ont été tuées au cours de fusillades.


Illustration : Françoise Bessières

mercredi 15 avril 2009

Heuliez en redressement judiciaire

Le tribunal de commerce de Niort a pris la décision de placer l’équipementier automobile Heuliez en redressement judiciaire avec une période d’observation de six mois. Les salariés y voient un espoir. L’activité sera repositionnée sur les voitures électriques, un projet que l’Etat a décidé de soutenir.

Rien n’était gagné pour le millier de salariés de l’équipementier français. Heuliez, durement frappé par la crise du secteur automobile, avait décidé en début d’année de sauver son activité en produisant des véhicules électriques. Sous-traitant pour les grands fabricants de voitures, Renault, Citroën, Peugeot et Opel, cette société est experte en mécanismes électriques. Elle a développé de nombreux concepts de toits ouvrants ou de banquettes pour ses commanditaires.

Heuliez est en difficulté depuis octobre 2007, notamment à cause de la faiblesse commerciale de l’Opel Tigra. Les investisseurs ne se sont pas pressés et l’accord prévu en 2008 avec Argentum Motors n’a pas pu être concrétisé.

En mars, les dirigeants et les employés d’Heuliez proposent une solution pour sauver l’entreprise de la liquidation judiciaire. L’équipementier propose au gouvernement un projet complet de développement d’une gamme de véhicules électriques propres, urbains et compétitifs. Il faut 45 millions d’euros pour remettre l’entreprise sur les rails. Luc Chatel, secrétaire d’Etat à l’industrie se dit prêt à mettre 10 millions sur la table mais refuse d’engager l’Etat français sans partenaires industriels et commerciaux. Il se montre peu optimiste et prône le réalisme : « Trouver un partenaire économique […], c’est difficile à faire en pleine crise ». Suite à sa visite sur le site de Cerisay le 25 mars, il quitte des ouvriers démoralisés par le peu d’engouement de M. Chatel.

Heuliez croit pourtant au potentiel de son nouveau véhicule, la Friendly. Cette petite voiture électrique correspond aux besoins de respect de l’environnement actuels. L’équipementier voit plusieurs marchés potentiels : les collectivités locales, les services de location, le parc automobile public. L’objectif est fixé à 5 000 véhicules pour l’année 2009.

Paris avait envisagé l’achat de 4 000 véhicules pour lancer son service Autolib de location de voitures électriques en libre service. Le projet est cependant en suspend et n’avance plus. Ségolène Royal a promis l’achat de 100 véhicules pour la région Poitou-Charentes et de 600 autres pour différentes villes. Elle serait prête à avancer 5 millions pour aider l’équipementier à se maintenir.

Madame Royal a pris les devants sur cette affaire et parle déjà d’organiser des négociations entre Renault et Heuliez afin de mettre en place un partenariat commercial. L’Etat a demandé à EDF de s’engager à hauteur de 5 millions et de partager son savoir faire en terme de batteries électriques. Heuliez se retrouve être l’enjeu d’un bras de fer entre la gauche et la droite qui redoublent à présent de bonnes attentions. Pour les salariés, c’est l’espoir d’un avenir qui s’offre à eux. Heuliez a jusqu’au 15 octobre pour trouver des partenaires et offrir des solutions sérieuses.


Illustration : Françoise Bessières
Crédit photo : Service Presse Heuliez France

mardi 14 avril 2009

Prisons françaises : évasion par pendaison

Edmond Dantès l’avait compris dans le Comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas, la mort est le meilleur moyen de sortir de prison. En France, les conditions de détention sont dénoncées par les associations de familles, par les syndicats de travailleurs pénitentiaires et par les instances internationales. L’hexagone compte l’un des taux les plus élevés de suicides parmi les détenus en Europe. Plus dramatique encore, les prisonniers ne sont pas les seules victimes de ce phénomène puisque les surveillants sont également nombreux à mettre fin à leurs jours.

Seule porte de sortie : le suicide

Ce qu’il manque aux détenus aujourd’hui, c’est l’espoir. Le Docteur Louis Albrand, chargé de rapport sur la prévention des suicides en prison rappelle que les êtres humains ont besoin de cet espoir pour vivre. Or selon lui, pour un nombre croissant de prisonniers, il n’existe aucun horizon. Le suicide devient alors le seul moyen d’échapper à un quotidien difficile ou à la honte du crime commis.

De 110 à 130 personnes se suicident chaque année en prison. Déjà 40 détenus ont mis fin à leurs jours depuis le début de l’année selon l’Observatoire International des Prisons. En Europe, la France est l’un des pays qui a le taux de suicides en prison les plus élevés avec 16 pour 10 000 en 2006, derrière la Suisse, la Servie et la Slovaquie selon M. Tournier, spécialiste du monde carcéral. Les populations les plus touchées sont les jeunes et les plus de soixante ans. La moitié des prévenus qui se suicident n’avaient pas encore été jugé.

En France, environ 65 000 personnes sont détenues pour un peu plus de 50 000 places. Les prisons sont bondées et dans un état de délabrement grave. Les prisonniers sont mélangés, petits délinquants et grands bandits peuvent ainsi se rencontrer, notamment dans les prisons pour femmes dont le nombre restreint oblige à mélanger jeunes mineures avec détenues plus matures. Dans le reportage diffusé dans l’émission Envoyé Spécial le jeudi 2 avril dans lequel des prisonniers témoignent de leur quotidien, un journaliste parle « d’école de la délinquance ». Les équipements sanitaires et les conditions d’hygiène sont déplorables. La sécurité n’est pas assurée et ce sont parfois les détenus qui font eux même la loi, décidant de régler des comptes ou de punir certains types de crimes comme le viol.

La notion de réinsertion devient floue. Les conditions d’enfermement rendent difficile le suivi d’une formation efficace, la sortie des systèmes illégaux et un suivi psychologique. La visibilité sur la population d’une maison d’arrêt est presque nulle pour les surveillants qui sont obligés de fermer les yeux sur de nombreux problèmes et de garder leurs distances pour se protéger.

Des matons qui n’en peuvent plus

Si le surveillant pénitentiaire était par le passé une véritable pression pour les prisonniers, il n’est aujourd’hui qu’une gêne dont on s’accommode. Confrontés aux conditions d’enfermement et à un manque d’effectifs, le personnel des prisons peine à maintenir l’ordre.

Le nombre de surveillants mettant fin à leurs jours inquiète et soulève une fois de plus la question des prisons françaises. Début avril, deux gardiens se sont suicidés, dans les maisons d’arrêt de Luynes (Bouches du Rhône) et de Fresnes (Val de Marne). Difficile de dire quelle part leur travail peut avoir dans le désespoir qui les a menés à ce geste. Ils ne montraient apparemment pas de signes évidents de dépression. Neuf gardiens ont ainsi mis fin à leurs jours depuis le début de l’année 2009 selon la CGT pénitentiaire.


Illustration : Françoise Bessières

dimanche 5 avril 2009

Les incroyables pouvoirs du clonage

Les techniques de clonage ont évolué depuis la naissance de Dolly. Aujourd’hui, les projets liés à cette science sont de plus en plus variés. L’un des plus incroyables rêves des biologistes d’aujourd’hui consiste à envisager de ramener à la vie des espèces disparues depuis plusieurs dizaines de milliers d’années.

Le clonage de mammifères ne relève plus de la science-fiction. En 1996 naissait la première brebis clonée, Dolly, une célébrité. L’animal a vécu sept ans avant d’être euthanasié, touché par une infection virale ayant infecté tout son troupeau. A l’époque, de nombreuses personnes avaient remis en doute l’efficacité du clonage et avait estimé que cette brebis était plus faible que ses congénères.

Depuis, d’autres animaux ont été clonés et ont permis de démontrer que cette technique fonctionnait. Depuis les premiers veaux nés en 1998, les bovins sont régulièrement sujets à ce type d’expériences. On compte aujourd’hui environ 1 500 bovidés clonés dont 77 en France. On peut même manger la viande de ces clones dans certains pays comme les Etats-Unis. En Europe, la population se montre opposée à l’idée de consommer ce type d’aliments.

Il est un autre domaine dans lequel le clonage fait son chemin. Depuis 2003, les scientifiques clonent des chevaux et commencent à commercialiser cette technique qui permet de préserver le patrimoine génétique de champions des sports hippiques pour en faire des étalons. Le coût d’un clonage de ce type est passé en quelques années de 300 000 à 200 000 euros. Si les éleveurs ne sont pas tous d’accord sur l’éthique de ces méthodes, les premiers étalons clonés ont déjà commencé à offrir une descendance.

Ramener à la vie des espèces disparues

Le Monde2 consacre cette semaine un dossier au clonage des mammouths. Une nouvelle technique est à l’étude qui permet à partir d’un génome proche de donner naissance à des animaux disparus voilà de nombreux siècles : mammouths, rhinocéros laineux, tigres à dents de sabre et autres dodos pourraient renaître à partir d’éléphants, de rhinocéros, de tigres ou de pigeons.

Les scientifiques ne pensent pas pouvoir ramener un jour les dinosaures à la vie. Leurs ossements, beaucoup trop vieux, sont devenus équivalents à de la roche, contrairement aux restes conservés dans la glace d’animaux comme le mammouth. Grâce à la richesse en ADN de ces restes, les chercheurs estiment qu’ils seront capables de cloner les premiers mammouths dans cinq à dix ans.

Une question éthique se pose alors quand à la création de Néandertaliens. Il est interdit partout dans le monde de cloner l’humain et ou de pratiquer des recherches dans ce domaine. En France, la loi de bioéthique de 2004 condamne fermement de tels projets. Seulement la communauté internationale a estimé que l’être humain commence au stade de l’homo sapiens. Neandertal ne serait donc pas un homme et n’entrerait pour l’instant pas dans le cadre de cette loi.


Illustration : Françoise Bessières

L’OTAN sans frontières

L’OTAN a été initialement mise en place pour faire face à l’ampleur croissante de l’Union Soviétique et de sa sphère d’influence. Au fil des années, l’histoire a fait son chemin et le bloc de l’est s’est effondré, laissant de nombreuses nouvelles républiques qui ont été intégrées au fur et à mesure à la structure militaire occidentale. Ukraine, Géorgie, Russie, pays du Moyen-Orient, qui sont les futurs alliés potentiels et où s’arrêtent les frontières de l’OTAN ?

La question des limites frontalières de l’OTAN peut faire penser au débat qui secoue l’Union Européenne. Si l’un est une alliance stratégique militaire et l’autre une union économique et monétaire, les deux se demandent quel doit être le lien entre intérêts géopolitiques et culture. Si la Turquie a largement trouvé sa place en 1952 grâce à sa situation géographique idéale entre Europe, Caucase et Moyen-Orient, la question se pose à présent de la judicité de rallier la Géorgie et l’Ukraine.

L’OTAN a ainsi été initialement créé pour faire face à l’Union Soviétique. Suite au démantélement de l’empire russe, les anciens pays du pacte de Varsovie ont été petit à petit intégrés à l’OTAN entre 1991 et 2008. Ces jeunes républiques à la diplomatie et à l’armée encore peu imposantes ont ainsi trouvé un moyen de s’assurer une indépendance parfaite vis-à-vis du voisin russe. La Russie considère pourtant qu’un grand nombre des pays anciennement membres de l’Union restent dans sa sphère d’influence. Ainsi les présidents Eltsine, Poutine puis Medvedev ont fait en sorte de maintenir la pression sur les voisins proches à l’ouest, sur le Caucase et sur l’Asie centrale. L’avancée de l’influence américaine vers les frontières russes a inquiété le Kremlin. La crise des boucliers antimissiles mis en place part la présidence Bush a déclenché la colère des Russes. Il reste difficile pour Barack Obama de désamorcer ce dossier et même si le dialogue est relancé, Dmitri Medvedev a déclaré le 17 mars qu’il comptait relancer l’industrie d’armement en masse pour rééquiper la marine et l’armée, envisageant de devoir se défendre contre l’OTAN.

L’Ukraine souhaiterait pouvoir rejoindre l’Alliance. Ce serait un moyen pour Kiev de gagner en autorité sur les questions énergétiques et d’avoir une réelle protection en cas de conflit trop important sur cette question avec Moscou. La Géorgie voit également dans l’OTAN un moyen de se protéger diplomatiquement et d’obtenir une couverture, au sens militaire du terme. Si Moscou a rappelé en aout 2008 que la Russie resterait maître de la région, l’intégration de Tbilissi à l’Alliance atlantique créerait une véritable complication stratégique.

Pour éviter de déclencher une crise diplomatique irréparable avec la Russie, l’OTAN a pour l’instant refusé de prendre en compte les candidatures de ces deux pays. Le débat fait rage entre les différents pays qui souhaitent plus ou moins ménager le Kremlin.

L’allié russe

La Russie n’est pourtant plus le danger primordial menaçant les Occidentaux depuis les années 90. Moscou devient petit à petit un partenaire stratégique sur le plan militaire. Une ambassade russe existe à l’OTAN, même si elle est fermée depuis le conflit russo-georgien, un ambassadeur, Dmitri Rogozine, continue d’assurer le lien entre les deux autorités.

La Russie est directement concernée par le conflit en Afghanistan. Une déroute de l’Alliance Atlantique exposerait la frontière des Russes qui restent opposés aux Talibans. Moscou a proposé d’apporter un appui logistique aux armées otaniennes et de les approvisionner. Les groupuscules extrémistes représentent une menace de taille pour la Russie.

Le gouvernement russe est également conscient de la puissance croissante des pays qui l’entourent. L’Iran et le Pakistan sont capables de lancer des missiles intercontinentaux et hébergent des régimes instables avec lesquels les relations diplomatiques sont loin d’être assurées sur le long terme. Moscou devient hésitante quand à l’attitude à adopter vis-à-vis de Pyongyang. Dmitri Medvedev et son influent premier ministre constatent l’isolement croissant de leur pays dans un monde où l’influence américaine reste forte et où les seuls opposants viables, le monde musulman et la Chine, ne proposent pas de solution envisageable.

L’Alliance atlantique veut s’exporter

L’OTAN est consciente plus que jamais du besoin d’évoluer. La Russie souhaite collaborer avec une Alliance qui aurait révisé ses objectifs politiques et militaires. C’est ce qui est en train de se faire. Les missions de l’Alliance sont de moins en moins orientées vers la protection territoriale mais de plus en plus vers les opérations de maintien de la paix, dans les Balkans, au Moyen Orient et parfois jusqu’en Afrique.

Les menaces visant les pays occidentaux ne sont plus les mêmes que pendant la Guerre Froide. Les moyens mis en œuvre ne sont donc plus les mêmes. Aujourd’hui, les Américains souhaitent étendre leur alliance militaire à tous les alliés fidèles et verraient bien le Brésil, l’Argentine, l’Australie, la Nouvelle Zélande, la Corée du Sud et le Japon intégrer l’OTAN. Le duo France-Allemagne reste le seul verrou bloquant cette évolution qui transformerait radicalement le rôle de cette alliance militaire dans le monde.

Une telle évolution pourrait mettre la Russie dos au mur et accélérer d’autres intégrations, recréant une notion de bloc américain qui devrait se trouver un ennemi uni et fort à affronter. Les Nations Unies perdraient énormément de pouvoir et le dialogue pourrait être rompu définitivement entre l’Amérique, ses alliés et ses opposants, notamment de la Ligue arabe.



Illustration : Françoise Bessières.

vendredi 3 avril 2009

Les chiens gentils mordent aussi

Chaque année apporte sa série d’attaques de chiens plus ou moins dramatique. Depuis le week-end dernier, en l’espace de quelques jours, ce ne sont pas moins de cinq accidents qui ont eu lieu, dont quatre impliquant des enfants. L’un est décédé, un autre est très grièvement blessé, les deux autres resteront marqué à vie. Les chiens à l’origine de ces attaques sont-ils de dangereux molosses ?

Mardi, un enfant de 11 ans est attaqué en pleine rue par trois chiens errants. Alors qu’il rejoint des camarades pour jouer, aux alentours de 18h30, les trois animaux, deux bergers allemands et un dogue, l’attaquent et le blessent gravement au bras. Si l’un des canidés a été aussitôt abattu par la police, les deux autres sont toujours en liberté. La municipalité de Sarcelle tente de les retrouver mais, si les appels sont nombreux pour signaler les animaux, la poursuite est restée pour l’instant sans succès. Il s’agirait de trois chiens errants, abandonnés, vivant en totale autonomie. Si un homme a été arrêté, suspecter d’être le propriétaire, il ne le serait pas officiellement et n’aurait fait que nourrir occasionnellement la bête selon le maire de la ville.

Il est difficile d’identifier les responsables pour des animaux errants. Ils sont pourchassés par les services publics, 45 auraient été capturés à Sarcelles en 2008 et pourtant, il y en a toujours en liberté.
Il y a également cette femme qui promenait son caniche. Pour sauver son chien, elle s’interpose et se fait mordre. Le propriétaire de l’animal agressif s’étonne de la réaction de sa chienne : « elle n’a jamais mordu personne, elle a du avoir peur du caniche ».

Mercredi, c’est encore une petite de vingt mois qui est mordue derrière la tête par un américain Staffordshire, classé chien dangereux. Le pronostic vital n’est pas engagé mais la fillette gardera des séquelles. Il s’agirait là d’un manque d’attention de la part des parents qui ont laissé l’enfant seule avec le chien.

Samedi dernier, une fillette de 6 ans est tuée par deux dogues appartenant à la famille à Chalons en Champagne. Les animaux vivent dans un enclos qui leur est destiné, isolé du reste de la propriété par des barrières. Ils sont habitués à cohabiter avec la fillette. Pourtant, alors que celle-ci joue dans le jardin, elle échappe à l’attention de sa maman et entre dans l’enclos. Elle escalade la niche des chiens qui l’attaquent et la mordent à la tête. Elle meurt sur le coup.

A priori, toutes les mesures de prudence ont été respectées par la famille. Si l’enclos n’était pas ce qu’il y a de plus conventionnel et solide, les animaux étaient cependant correctement dressés et ne souffraient d’aucune maltraitance. L’enfant et les chiens ne se retrouvaient jamais seuls sans surveillance. Les deux dogues avaient été habitués à la présence de la petite et celle-ci avait été sensibilisée à la cohabitation avec ces deux gros chiens.

Les parents de la fillette ne seront pas poursuivis. Le décès est considéré comme accidentel.

Tous les chiens sont potentiellement dangereux

Si la presse dénonce une loi des séries, il s’avère que chacun de ces faits divers est différents des autres. Les animaux sont tantôt des chiens dangereux, tantôt des animaux non classés. Certains vivent au quotidien avec les victimes, d’autres les ont croisé par hasard. La majorité semble ne jamais avoir manifesté de comportements agressifs envers l’homme.

Les services publics se sont empressés de rappeler quelques règles élémentaires, notamment en ce qui concerne la cohabitation entre des gros chiens et des enfants. Encore une fois, des doutes sont émis quand à l’efficacité de la loi, mise en place en 1999 et à laquelle Michelle Alliot-Marie a fait ajouter des décrets suite à une série d’agressions en 2007.

Peut-on alors se prémunir de la dangerosité des chiens ? S’il est aisé de ne pas en avoir à la maison, quand bien même les accidents sont rares, il est impossible de faire disparaître les chiens extérieurs. La solution semble évidente lorsque les chiens subissent des maltraitances, des comportements illégaux ou irresponsables de la part de leurs maîtres. Mais que dire des chiens qui se sont toujours montrés calmes ou des animaux errants ? Il semblerait que personne ne soit à l’abri d’un accident canin. C’est pourtant à chaque fois la responsabilité humaine et la dangerosité animale qui sont avancés au détriment des propriétaires et amoureux de la race canine se considérant comme responsables et prudents.

Les chiens sont des animaux qui ont un instinct et des réflexes qui ne sont pas toujours cohérents pour l’homme. Ainsi, l’animal, même s’il est impressionnant pour nous, pourra se sentir menacé par des choses apparemment innocentes. Ainsi, un molosse enfermé dans un enclos qui voit une fillette escalader sa niche se sentira envahit et menacé. Pris au piège, il optera pour la seule solution qui lui reste, l’attaque. Comprendre ces comportements animaliers peut aider à prévenir les risques mais ne protège pas de l’accident malheureux. L’attaque animale est-elle comparable à la chute d’un arbre sur une route ? Imprévisible et simplement imputable aux risques de la nature ?

Pour Patrick Rouchon, spécialiste interrogé par France-Soir, tous les chiens peuvent attaquer s’ils se sentent menacés. Chaque cas serait différent et il n’y aurait pas de risque zéro. Les dogues qui ont attaqué la fillette en Champagne sont une espèce rarement impliquée dans des accidents. Pour M. Rouchon, la loi est donc peu judicieuse puisqu’elle distingue des animaux plus ou moins dangereux en fonction de leur gabarit et de leurs origines. Labradors ou bergers allemands sont pourtant régulièrement impliqués.



Illustration : Françoise Bessières

jeudi 2 avril 2009

Sarkozy ne les sauvera pas tous

« Je vais sauver le site ». Les mots sont lâchés. C’est la promesse que Nicolas Sarkozy a faite mercredi matin sur l’antenne d’Europe 1. Le président estime qu’il est de son devoir de répondre à l’appel au secours lancé par les 733 salariés de Caterpillar menacés de perdre leurs emplois sur les sites de Grenoble et d’Echirolles.

Depuis que l’annonce du plan de licenciement a été faite, les ouvriers du constructeur d’engins de chantiers grondent. Le groupe est pourtant menacé par la conjoncture et évalue la baisse de son chiffre d’affaire à -20%. Afin d’anticiper cette perte d’activité, le groupe américain a décidé de licencier 20 000 de ses 113 000 employés à travers le monde.

Les salariés ont décidé de faire comprendre à leurs dirigeants qu’ils n’étaient pas d’accord avec cette décision et ont réclamé de recevoir une fois leur salaire par année d’ancienneté jusqu’à un maximum de 30 000 euros. Le constructeur refuse de dépasser 10 000 euros par employé. La direction et les ouvriers peinent à s’entendre et l’encadrement a refusé de participer à plusieurs réunions avec le comité d’entreprise. Après trois jours de grève, le mouvement social a escaladé jusqu’à retenir quatre cadres dont le directeur général du site pendant 24 heures.

Les syndicats ont écrit à Nicolas Sarkozy afin d’obtenir des aides en provenance du Fond européen d’ajustement à la mondialisation. La réponse du président s’est faite pendant une interview sur TF1 au cours de laquelle il a estimé qu’il était son devoir de répondre à « l’appel lancé par les salariés de Caterpillar ». Il a promis qu’il sauverait le site. Pourtant, conscient de l’énorme baisse de la demande sur le marché américain. Nicolas Sarkozy peut-il donc sauver les employés de Caterpillar ?

Depuis Gandrange, les Français n’ont plus confiance

Cette promesse rappelle celle qui avait été faite en février 2008 aux ouvriers de l’aciérie d’Arcelor Mittal de Gandrange. Le président avait alors déclaré vouloir investir dans Gandrange coûte que coûte. Les ouvriers avaient compris par ces mots que leur usine serait sauvée. Les choses n’ont pas évolué comme prévu.

En réalité, Nicolas Sarkozy a négocié avec le groupe Lakshmi Mittal afin de les inciter à investir dans le site. L’aciérie aura tout de même fermé ses portes fin mars mais 30 millions ont été investis par le gouvernement en plus des 10 millions du groupe indien. Mais là où les salariés entendaient sauvetage d’emplois, le président entendait reconversion du site et reclassements des employés. S’agit’ il d’une erreur d’interprétation ?

Pour les salariés, les choses sont claires : il s’agit d’un « mensonge d’Etat », « Nicolas Sarkozy nous a trahit » disent-ils.

Des mots trompeurs

Il est intéressant de se demander si l’erreur est involontaire. Il est envisageable qu’éventuellement une erreur d’interprétation ait été faite. Pourtant, le président recommence la même manœuvre. Cela prouve qu’il sait très bien ce qu’il fait. Les employés de Caterpillar ne sont d’ailleurs pas dupes et ont bien compris que leurs emplois ne seraient pas sauvés en l’état.

L’inquiétude reste donc grande. Un grand nombre d’entre eux ne sont pas hostiles à une reformation et réclament simplement des solutions pour pouvoir vivre. C’est ce que le président entend leur proposer au plus tôt. Comme il l’a fait à Gandrange, il pourrait mettre en place un organisme de formation. Le problème c’est qu’à Gandrange, selon les syndicats, seuls 46 des 575 emplois perdus ont été remplacés. Pour les autres, si il y a formation, il n’y a pour l’instant pas de solution.

Illustration : Vincent Goulot