mardi 31 mars 2009

Omar el-Bachir entend démontrer l’impuissance de la Cour Pénale Internationale

La Cour Pénale Internationale a lancé le mandat d’arrêt pour crimes de guerre et crime contre l’humanité contre Omar el-Bachir le 4 mars 2009. Le tribunal de La Haye l’a jugé responsable des exactions perpétrées par les milices gouvernementales dans la région du Darfour, plongée dans la guerre civile. Depuis la publication de cet arrêt, Omar el-Bachir veut prouver que la CPI n’a aucun pouvoir et qu’il est toujours libre d’exercer son plein pouvoir de chef d’état.

Depuis le début du mois, le chef d’état condamné a multiplié les actes provocateurs visant à montrer sa liberté d’action. Après un premier voyage peu risqué en Erythrée, il a effectué deux cours séjours en Egypte et en Libye afin de préparer le sommet de Doha. A chacune de ces visites, Omar el-Bachir a tenu à montrer qu’il ne se sentait pas inquiété par ce mandat d’arrêt international et il a appelé les autres Etats à le soutenir.

Il aura obtenu ce soutien au 21ème sommet de la Ligue arabe à Doha. Il réclame à ces homologues de manifester leur désaccord avec les déclarations de La Haye. Lundi 30 mars, la Ligue arabe rejette officiellement le mandat et déclare qu’Omar el-Bachir ne sera pas poursuivi.

Omar el-Bachir a organisé cette véritable campagne de communication afin de se construire un véritable réseau d’alliés. Si à un moment la justice internationale l’a inquiété, il a mis en place une protection qui devrait lui éviter de se faire poursuivre pour l’instant. La Cour Pénale Internationale doit compter sur la collaboration des Etats pour pouvoir appliquer les sanctions. Il est important de noter que la majorité des pays musulmans n’ont jamais reconnu son autorité.

Omar el-Bachir devient un symbole de l’anti-occidentalisme

Ses soutiens majeurs lors de ce sommet de Doha ont été Mouammar Kadhafi en Libye et Bachar el-Assad en Syrie. L’un et l’autre ont trouvé en ce nouveau scandale un moyen de trouver un soutien dans leur opposition à l’Occident. Le leadeur libyen, en conflit presque permanent avec les Etats-Unis et l’Europe, malgré quelques rapprochements, cherche ainsi à regrouper le reste des pays arabes et à isoler ceux qui sont trop proches de l’ouest.

Le président syrien a littéralement récupéré le cas el-Bachir pour sa propre cause. Il dénonce lors du sommet un complot occidental qu’il compare aux origines du problème palestinien. La diplomatie des pays arabes est ainsi marquée par un échange de bons procédés flagrant entre les différents chefs d’états confrontés à une forte opposition en occident. En se soutenant les uns les autres, ils deviennent plus forts.

Omar el-Bachir a enfin trouvé un nouveau soutien en la personne d’Hugo Chavez qui a condamné le mandat de la CPI et a dénoncé les « horreurs que l’on fait subir aux pays du tiers-monde ». Dans sa déclaration, le président vénézuélien rapproche également les autorités américaines, israéliennes et occidentales en général. Le fait que les Etats-Unis n’aient pas ratifié l’arrêté de la Cour Pénale Internationale ne semble pas changer la donne.

Aucun soutien pour la CPI

L’un des espoirs de la Cour Pénale Internationale aurait été une action ou au moins une prise de position de la part du secrétaire général de l’ONU. Ban Ki-moon se retrouvait en effet en face de Omar el-Bachir pour la première fois depuis cette condamnation. Ce dernier l’aura interpellé violemment en lui reprochant l’affront qui lui est fait par le tribunal de La Haye. Ban Ki-moon n’a pas pris part sur ce point mais a dénoncé l’expulsion des 13 ONG chassées du Darfour comme réponse du président au mandat le visant.

Selon un diplomate de l’ONU cité par Le Figaro, le secrétaire général ne pouvait pas prendre position sur ce débat du fait de la présence du Soudan aux Nations Unies. Il ne peut ainsi soutenir une condamnation prononcée par un organisme indépendant dont la majorité des pays arabes sont absents et que plusieurs grands pays comme les Etats-Unis, la Russie ou la Chine ne font pas partie. Il ne faudrait pas que les pays arabes se braquent et quittent l’organisation internationale, aggravant ainsi les difficultés entre l’Occident et la Ligue arabe.

La crédibilité de la Cour Pénale Internationale est mise en cause. Si des soutiens forts ne se manifestent pas, Omar el-Bachir pourrait pousser son avantage et achever de se rire de cette organisation. Un voyage au Vénézuela serait problématique, ce pays ayant signé la charte du tribunal de La Haye. Hugo Chavez pourrait cependant accepter une visite du président soudanais afin de manifester sa propre indépendance. Ce serait un moyen de rapprocher les opposants de l’Occident que comptent l’Amérique du Sud et le monde arabe en se servant de ce conflit comme motif.
Illustration : Françoise Bessières

lundi 30 mars 2009

Mayotte restera française

Ils ont dit oui dans au référendum du dimanche 29 mars. Les Mahorais, interrogés sur leur souhait de devenir le 101ème département ont encore une fois opté pour l’appartenance à la France. Une grande victoire pour les politiciens de l’île, en majorité favorable à cette réforme. Mayotte deviendra le cinquième département d’outre mer en 2011.

Pour les habitants, c’est une reconnaissance et la chance de pouvoir bientôt accéder aux même avantages et protections que les habitants de la métropole. Malgré un taux d’abstention de 41%, la population mahoraise a toujours souhaité maintenir son appartenance à la France. Déjà interrogés en 2000, ils avaient été 73% à choisir de devenir une collectivité d’outre-mer.

L’île va avoir deux ans pour adapter son fonctionnement et sa culture et se rapprocher du fonctionnement de la France. L’administration va ressembler à celle de la France. Si un préfet est déjà nommé, la région aura maintenant de véritables pouvoirs et sera en charge notamment de gérer le système scolaire. L’amélioration de l’apprentissage de la langue est l’un des enjeux principaux. Ce nouveau statut marquera également une amélioration importante pour les femmes. Actuellement, l’âge légal de mariage pour les jeunes filles est de quinze ans et la polygamie est autorisée. La justice sera également réformée, en particulier dans les villages où les cadis, des juges musulmans appliquant le droit comorien, se verront réaffectés à un rôle de médiation sociale.

Les politiciens de l’île ont toujours souhaité que Mayotte soit ainsi reconnue. Ils y voient la possibilité de sortir l’île de son marasme et de développer son économie.

Une île en difficulté

La situation économique de Mayotte est en effet dramatique. Forte de près de 190 000 habitants, dont 50 à 60 000 en situation illégale, l’île est une véritable plaque tournante de l’immigration clandestine. 22% des Mahorais sont au chômage. Pourtant, le taux de croissance de 9% est important. Ainsi, si les indicateurs sont proches de ceux des autres départements d’outre mer, Mayotte bénéficie d’un fort potentiel.

Actuellement, le tourisme est très peu développé. Le sol, très fertile et riche en minéraux, favorise les cultures. Les secteurs développés sont ceux de la banane, de l’orange, du manioc, de l’ylang-ylang, de la vanille et du girofle.

L’île souffre également de l’arrivée permanente de nombreux Comoriens qui viennent en espérant trouver du travail ou des moyens de se soigner. L’appartenance de Mayotte à la France n’est pas reconnu par l’archipel ni par l’ONU même si ce sujet n’est plus à l’ordre du jour aux Nations Unies. Pour la communauté internationale, ce territoire aurait du retrouver son indépendance lorsque les colonies ont été libérées. Les habitants avaient cependant choisi à ce moment de rester sous contrôle français.

Les Mahorais ont toujours vu en la métropole un partenaire leur permettant de prospérer. Les moyens mis en œuvre pour soutenir l’île, notamment en termes de sécurité et de santé, créent un véritable gouffre avec les iles voisines.

L’Eldorado mahorais

Si l’île était déjà attirante pour les voisins, elle va le devenir encore plus. Le nouveau statut de département d’outre-mer va offrir de nouvelles opportunités aux habitants. Les aides sociales, même si elles seront réduites afin, selon le gouvernement, de ne pas déstabiliser l’économie de l’île, doivent permettre d’améliorer le quotidien. Mayotte pourra également bénéficier des aides au développement régional qu’offre la communauté européenne.

Le droit à la nationalité par le sol devrait d’ailleurs être adapté afin d’éviter les flux d’immigrations originaires du reste des Comores. Les droits de douane et la justice seront actualisés et renforcés pour améliorer le contrôle de la population.

La France entend montrer avec ce référendum sa légitimité sur le sol de Mayotte. Si les Comores et l’ONU n’ont pas encore reconnu ce scrutin, Paris estime que le peuple a choisit. Ce territoire qui offre un point stratégique entre l’océan Indien et le continent africain ne devrait plus être sujet à polémique.



Illustration : Françoise Bessières

samedi 28 mars 2009

Vers une nouvelle crise des missiles nord-coréens

Cette fois, le gouvernement nord-coréen a décidé d’anticiper les complications en prévenant la communauté du lancement prochain d’une fusée pour mettre un satellite de communication en orbite. La Corée du Sud et le Japon dénoncent un test de missile balistique intercontinental déguisé. La Chine et la Russie reste discrets, même si Moscou a haussé le ton le mois dernier. Les Etats-Unis cherchent à se positionner, entre obligation de ménager ses partenaires et poursuite de leur nouvelle diplomatie.

Le ministre des Affaires Etrangères nord-coréen a pourtant prévenu la communauté internationale : empêcher le lancement d’un satellite de télécommunications en orbite serait un manquement au droit de jouissance de l’espace. A Séoul, les autorités estiment qu’il s’agit d’un test de missile de type Taepodong-2. La crainte des sudistes est de voir le régime communiste effectuer son tir, prévu entre le 4 et le 8 avril, sans que des mesures ne soient prises en conséquence, à savoir l’application de la résolution 1718 de l’ONU, mise en œuvre lors de la première crise en 2006.

Missile balistique intercontinental ou lanceur de satellite

Il est délicat de confirmer de quel engin il s’agit. Les lanceurs de satellites et les missiles intercontinentaux sont des engins utilisant des technologies semblables. Spoutnik avait d’ailleurs été mis en orbite par une fusée de type R-7 Semiorka, conçu sur le modèle d’un missile balistique. La mise en orbite d’un satellite est souvent une manière de tester des armes à longue portée tout en signifiant au reste du monde que l’on est capables de tirer sur des distances comprises entre 5 000 et 10 000 kilomètres. En aout dernier, l’Iran avait également utilisé un lanceur pour mettre en orbite un satellite, une manière d’affirmer sa capacité à atteindre Israël en cas de besoin.

Le missile balistique intercontinental coréen, Taepodong-2, aurait une portée évaluée à 6 700 kilomètres et menacerait donc principalement la Corée du Sud et le Japon. Le missile serait également susceptible d’atteindre le sol américain en touchant l’Alaska. Ce type de lanceur est utilisé notamment pour propulser des têtes nucléaires et si une arme de ce type nécessiterait encore d’importants travaux, les signes montrent que le président Kim Jong-Il ne renonce pas à ses projets de nucléaire militaire.

Des négociations complexes

La Corée du Sud craint qu’une fois de plus, les différents négociateurs ne haussent le ton sans que des mesures fermes ne soient adoptées. La Russie s’inquiète de la menace croissante de ce type d’armes autour de son territoire, entre l’Iran à l’ouest et la Corée du Nord à l’est, sans pour autant se positionner trop fermement. La Chine reste favorable à son voisin communiste. Le Japon est prêt à se défendre et a prévenu qu’il détenait des systèmes de défenses capables de neutraliser toute ogive nord-coréenne.

Les Etats-Unis sont dans une situation particulièrement épineuse. Arbitre majeur des discussions avec la Corée du Nord, ce pays est gêné par plusieurs complications. La première est historique : en 1998, la diplomatie américaine avait déjà dénoncé la préparation d’un lancement de missile Taepodong-1 et s’était trompé. Il serait délicat de refaire la même erreur aujourd’hui. Un deuxième problème est économique : Washington et Pékin se sont toujours opposés sur ce dossier, or les américains ont besoin de ménager la Chine qui est un des acteurs majeurs de toute solution à la crise économique actuelle. Troisième complication, deux ressortissantes américaines sont prisonnières en Corée du Nord depuis le 17mars. Il s’agit de deux journalistes arrêtées à la frontière sino-coréenne et qui représente un moyen de pression non négligeable.

Missile intercontinental ou lancement civil, la question reste posée. Si les informations données par les autorités nord-coréennes pourraient passer pour une recherche de transparence et d’officialité, il s’agit en réalité du seul moyen d’éviter une catastrophe diplomatique. Le président japonais a en effet prévenu que les systèmes de défenses de l’archipel seraient mis en œuvre si le moindre tir était détecté et qu’il serait assimilé à une déclaration de guerre. Or, qu’il s’agisse d’un lanceur à visée civile ou d’une arme, l’un des lanceurs auxiliaires doit retomber en mer du Japon. Le Ministère des Affaires Etrangères nord-coréen couvre ainsi ses arrières et évite d’atteindre le point de non retour.

La communauté internationale ne sait donc comment réagir et chacun prévient en évitant de trop s’engager. Pour le gouvernement sud-coréen, il est évident que s’il s’agit d’un tir militaire, les différents pays hausseront le ton et menaceront le régime communiste. Puis les tensions retomberont pour revenir à la table de négociation jusqu’à la prochaine crise. Séoul demande une nouvelle fois que la résolution 1718 soit effectivement mise en œuvre.

Illustration : Françoise Bessières

vendredi 27 mars 2009

La Marine nationale recrute à l’américaine

« Alors, on y va ? »

C’est la question qui est posée au candidat potentiel par la campagne de recrutement qu’a lancée la Marine nationale le jeudi 26 mars. Une première pour cette armée qui n’avait jamais eu recours à ce type d’outils. Au programme, trois volets qui s’étalent sur une période d’un mois. Deux clips seront diffusés sur les écrans de télévision invitant le spectateur à continuer l’aventure sur la toile. En ligne, les visiteurs peuvent alors jouer à des jeux-vidéos plutôt bien conçus dans leur genre présentant les différents métiers de la Marine. Enfin, des portes ouvertes seront organisées partout en France le 28 mars.

Une campagne à 3 millions d’euros, préparée par l’agence Ketchum et qui reprend tous les arguments incitant à rejoindre les armées modernes : opportunités de carrière, diversité des métiers, activité dynamique et enrichissante. On retrouve d’ailleurs la recette de la dernière campagne de l’Armée de terre qui offrait à ses candidats une vie riche en apprentissages et en action.


La Marine Nationale peine à renouveler ses effectifs.

Le nombre de candidats à l’embarquement a terriblement chuté ces dernières années. Selon le blog spécialisé Secret Défense, le nombre de postulants est passé de 20 000 en 2005 à 10 000 en 2004. En 2008, seuls 3 600 nouveaux marins ont été recrutés pour 4 300 postes disponibles. Une pénurie de jeunes recrues que les efforts de l’armée n’ont pas réussi à endiguer. La Marine a pourtant grandement amélioré la qualité de vie des personnels navigants, les conditions de travail et le lien avec les familles.

L’objectif principal de cette campagne de communication serait donc de relancer l’intérêt des populations les plus jeunes avant d’atteindre un seuil de recrutement trop critique.

Des méthodes inspirées des campagnes américaines.

Les nouveaux outils de communication de l’armée ressemblent à s’y méprendre à ceux qu’emploient les recruteurs américains. Tant par les thèmes et les ambiances mis en avant dans les publicités que par le recours à des jeux-vidéos et à des outils informatiques modernes. Pour mémoire, la Marine avait lancé un stand de recrutement sur l’environnement virtuel Second Life en 2007.

Les clips télédiffusés imitent ceux produits par l’US NAVY et les gardes côtes américains et avec le recours massif au ludique, on retrouve les stands de recrutement que l’armée installe dans les lieux hautement fréquentés par la jeunesse américaine. De jeunes recrues qui se laissent séduire par le goût de l’aventure et de l’action ou par la possibilité d’une formation. Ils ont été nombreux à regretter ce choix une fois sur le terrain et à dénoncer un manque d’information. Une autre similitude qui interpelle, plus de 50% des besoins de l’armée correspondent à des jeunes de niveau lycée auxquels on promet un salaire attractif malgré l’absence de formation.

La campagne de la Marine se veut elle pédagogique. Les jeux offerts par le site Internet doivent être un moyen d’interpeller le public, de l’amener à poser ses question et à envisager la carrière de marin.

Illustrations : Françoise Bessières