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Vers une nouvelle crise des missiles nord-coréens

Cette fois, le gouvernement nord-coréen a décidé d’anticiper les complications en prévenant la communauté du lancement prochain d’une fusée pour mettre un satellite de communication en orbite. La Corée du Sud et le Japon dénoncent un test de missile balistique intercontinental déguisé. La Chine et la Russie reste discrets, même si Moscou a haussé le ton le mois dernier. Les Etats-Unis cherchent à se positionner, entre obligation de ménager ses partenaires et poursuite de leur nouvelle diplomatie.

Le ministre des Affaires Etrangères nord-coréen a pourtant prévenu la communauté internationale : empêcher le lancement d’un satellite de télécommunications en orbite serait un manquement au droit de jouissance de l’espace. A Séoul, les autorités estiment qu’il s’agit d’un test de missile de type Taepodong-2. La crainte des sudistes est de voir le régime communiste effectuer son tir, prévu entre le 4 et le 8 avril, sans que des mesures ne soient prises en conséquence, à savoir l’application de la résolution 1718 de l’ONU, mise en œuvre lors de la première crise en 2006.

Missile balistique intercontinental ou lanceur de satellite

Il est délicat de confirmer de quel engin il s’agit. Les lanceurs de satellites et les missiles intercontinentaux sont des engins utilisant des technologies semblables. Spoutnik avait d’ailleurs été mis en orbite par une fusée de type R-7 Semiorka, conçu sur le modèle d’un missile balistique. La mise en orbite d’un satellite est souvent une manière de tester des armes à longue portée tout en signifiant au reste du monde que l’on est capables de tirer sur des distances comprises entre 5 000 et 10 000 kilomètres. En aout dernier, l’Iran avait également utilisé un lanceur pour mettre en orbite un satellite, une manière d’affirmer sa capacité à atteindre Israël en cas de besoin.

Le missile balistique intercontinental coréen, Taepodong-2, aurait une portée évaluée à 6 700 kilomètres et menacerait donc principalement la Corée du Sud et le Japon. Le missile serait également susceptible d’atteindre le sol américain en touchant l’Alaska. Ce type de lanceur est utilisé notamment pour propulser des têtes nucléaires et si une arme de ce type nécessiterait encore d’importants travaux, les signes montrent que le président Kim Jong-Il ne renonce pas à ses projets de nucléaire militaire.

Des négociations complexes

La Corée du Sud craint qu’une fois de plus, les différents négociateurs ne haussent le ton sans que des mesures fermes ne soient adoptées. La Russie s’inquiète de la menace croissante de ce type d’armes autour de son territoire, entre l’Iran à l’ouest et la Corée du Nord à l’est, sans pour autant se positionner trop fermement. La Chine reste favorable à son voisin communiste. Le Japon est prêt à se défendre et a prévenu qu’il détenait des systèmes de défenses capables de neutraliser toute ogive nord-coréenne.

Les Etats-Unis sont dans une situation particulièrement épineuse. Arbitre majeur des discussions avec la Corée du Nord, ce pays est gêné par plusieurs complications. La première est historique : en 1998, la diplomatie américaine avait déjà dénoncé la préparation d’un lancement de missile Taepodong-1 et s’était trompé. Il serait délicat de refaire la même erreur aujourd’hui. Un deuxième problème est économique : Washington et Pékin se sont toujours opposés sur ce dossier, or les américains ont besoin de ménager la Chine qui est un des acteurs majeurs de toute solution à la crise économique actuelle. Troisième complication, deux ressortissantes américaines sont prisonnières en Corée du Nord depuis le 17mars. Il s’agit de deux journalistes arrêtées à la frontière sino-coréenne et qui représente un moyen de pression non négligeable.

Missile intercontinental ou lancement civil, la question reste posée. Si les informations données par les autorités nord-coréennes pourraient passer pour une recherche de transparence et d’officialité, il s’agit en réalité du seul moyen d’éviter une catastrophe diplomatique. Le président japonais a en effet prévenu que les systèmes de défenses de l’archipel seraient mis en œuvre si le moindre tir était détecté et qu’il serait assimilé à une déclaration de guerre. Or, qu’il s’agisse d’un lanceur à visée civile ou d’une arme, l’un des lanceurs auxiliaires doit retomber en mer du Japon. Le Ministère des Affaires Etrangères nord-coréen couvre ainsi ses arrières et évite d’atteindre le point de non retour.

La communauté internationale ne sait donc comment réagir et chacun prévient en évitant de trop s’engager. Pour le gouvernement sud-coréen, il est évident que s’il s’agit d’un tir militaire, les différents pays hausseront le ton et menaceront le régime communiste. Puis les tensions retomberont pour revenir à la table de négociation jusqu’à la prochaine crise. Séoul demande une nouvelle fois que la résolution 1718 soit effectivement mise en œuvre.

Illustration : Françoise Bessières