« Accueil | L'UMP pose un genou mais ne s'effondre pas. » | Tibet 2008, des Jeux au goût de cendre et de sang. » | Le troisième homme ... de paille ? » | La littérature amputée par le conflit israélo-pale... » | Espagne : une nouvelle victime de l'ETA renverse l... » | Enfin un gouvernement pour la Belgique. » | Les retombées de la crise des subprimes arrivent s... » | Robins des Bois du 21ème siècle. » | L'abus de bavures est dangereux pour la santé, à c... » | Au Bhoutan, avant les élections, on s'échauffe. »

Villier le Bel, une expérience policière au profit de l'orgeuil médiatique.

160 policiers appuyés par 160 CRS pour arrêter 15 jeunes de quartiers. Lundi 17 mars, cette opération menée à Grigny dans l'Essonne passe presque inaperçue. Des policiers avaient été pris pour cible par des jeunes armés le 2 mars, une attaque que la ministre de l'intérieur a qualifiée de « guet-apens ». Des arrestations qui pourraient paraître démesurées. Est il besoin de mobiliser plus de 300 officiers pour interpeller 15 jeunes dont 5 étaient encore mineurs ? Les chiffres semblent démesurés.

Ils rappellent ceux de Villiers le Bel, encore plus impressionnants. 1 100 policiers mobilisés pour arrêter 35 personnes. Les troupes avaient été réquisitionnées sur toute la banlieue parisienne mais également à Lille. Des CRS, la BAC, le RAID, ils avaient tous participés à cette immense opération parfaitement organisée. Les journalistes avaient d'ailleurs été informés et avaient largement couvert cet événement.

Une politique était d'ailleurs née sur le rôle de la presse dans le problème des émeutes en banlieue. Les médias dans un élan d'auto flagellation avaient cerné le jeu du ministère de l'intérieur, qui visait à mener ce grand spectacle de communication afin de largement informer sur le travail modèle des agents de police. La presse refusa alors de se laisser utiliser et se dénonça d'elle même. En attendant, les images et les résultats avaient été largement diffusés.

Curieusement, pas de presse à Grigny. Ceux des journalistes qui ont le plus de remords du rôle des médias dans les interpellations de Villiers le Bel, ou qui n'avaient pu en profiter pour produire eux même du contenu dessus, se sont précipités sur cette occasion de ressortir cette vieille polémique. Villiers le Bel était bien une opération de communication puisque les reporters n'étaient pas conviés à Grigny.

Et pourtant il semblerait que l'objectif de la police n'ait été à aucun moment de faire bonne impression. En effet, MediaPart publiait le 18 mars deux documents internes à la police, des rapports, qui regroupaient les conclusions faites suite à « l'expérience Villiers le Bel ». Il se serait donc bien agit d'une expérimentation et non de communication. En effet, les manoeuvres quasi militaires de cette opération étaient à l'opposé des déboires de novembre 2007. La police avait alors eu plus de 200 blessés et n'était pas passée loin de la pénurie de munitions.

Les dernières opérations menées dans les quartiers sont donc bien un avant goût des interventions de demain. Des policiers organisés, nombreux et équipés qui interviennent de façon rapide et offensive. Parmi les moyens demandés, on trouve une large panoplie d'équipements anti émeutes et militaires : des armes plus lourdes (balles en plastique dur calibre 40mm), des véhicules lourds, blindés et équipés pour franchir les obstacles, des fumigènes en quantité, plus de munitions, des hélicoptères, des systèmes d'éclairage... Tout le nécessaire pour partir en guerre contre les émeutiers de la banlieue.

Le modèle fait penser à celui des armées conventionnelles occidentales : des équipes autonomes très hiérarchisées dans lesquelles chaque homme à un équipement spécifique complémentaire avec ses camarades et des moyens techniques à la pointe de la technologie. La direction de la police réclame également de nouvelles formations avec notamment des officiers transmissions, exactement comme dans les groupes militaires, qui auraient en charge de gérée la communication, l'un des facteurs qui avaient participé à la débâcle de novembre étant la panique qui avait empêché les forces de police de communiquer efficacement. La police réclame également de nouvelles unités spécialisés dans la lutte anti émeute en banlieue et une intervention du RAID systématisée, afin de soutenir le moral des troupes.

La guerre aux émeutes est donc déclarée. Mais ces moyens ne sont ils pas démesurés pour faire face à des groupes de jeunes ? La question se pose quand à savoir s'il ne risque pas d'y avoir un trop plein de répression et pourtant, les gardiens de la paix ayant à affronter lors de ces incidents des tirs d'armes à feu légères, des engins explosifs incendiaires et de véritables manoeuvres de harcèlement, n'est il pas normal qu'ils mettent en oeuvre les moyens nécessaires pour lutter efficacement sans mettre en danger leurs vies, celles des habitants et celles des émeutiers ?

Pourtant, la mise à disposition de tels moyens entre les mains d'officiers n'ayant pas toujours la pleine maîtrise de leurs actions peut s'avérer dangereux. Les explosions dans les quartiers sensibles sont presque toujours survenues suite à des incidents au cours desquelles la police avait perdu le contrôle de la situation, que ce soit pour les émeutes de 2005 ou de 2007, on remarque qu'à chaque fois, des jeunes ont été tués au cours d'une interpellation ou par accident par des policiers. Des moyens supérieurs pourraient être à l'origine de nouvelles bavures. Si la police souhaite pouvoir former les hommes qui interviendront, la période de transition risque d'être houleuse, les hommes les moins bien formés n'étant pas près à évoluer dans ces nouvelles unités.